Hadopi entre en campagne

Le 13 février 2012

En transmettant les dossiers d'internautes à la justice, Hadopi, la Haute autorité créée pour lutter contre le téléchargement illégal, continue à faire parler d'elle. Et se rappelle au bon souvenir des candidats à la présidentielle.

Le trac électoral de l’Hadopi

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2012 se fera avec la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi), c'est ...

De nombreux paris avaient été lancés : l’Hadopi ira-t-elle jusqu’au bout ? La Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet aurait tranché : selon des informations du Point, elle aurait “désormais transmis, un peu partout en France, les dossiers des internautes aux procureurs de la République.” Entrant ainsi avec fracas dans la campagne présidentielle. Et faisant mentir au passage une bonne partie des observateurs, qui misait sur une retenue contrainte de l’institution, symbole d’un sarkozysme numérique aux forceps, en ces temps électoraux.

Que nenni : l’Hadopi semble vouloir se rappeler au bon souvenir des politiques et de l’opinion, en faisant aboutir le fameux mécanisme de “réponse graduée”, qui a tant suscité le débat lors de l’adoption de la loi Création et Internet, à l’origine de l’autorité. La procédure se divise en trois phases : les deux premières, préventives, consistent en l’envoi d’avertissements aux internautes flashés par l’Hadopi ; la dernière peut éventuellement aboutir à la suspension de l’abonnement à Internet. Le Point rappelle qu’entre janvier 2010 et juin 2011, près de 470 935 avertissements ont été adressés par mail, donnant suite à 20598 lettres recommandées. Toujours selon le Point, seule une dizaine de cas aurait atterri devant la Commission de Protection des droits, le bras armé de l’Hadopi. Le site Ecrans évoque de son côté le chiffre de 165 abonnés. Comme le rappelle le schéma officiel (souvenir, souvenir), c’est la CPD qui décide de transmettre ou non les dossiers des récalcitrants au Parquet. Comme le rappelait à l’époque Marie-François Marais, à la tête de l’institution, “l’Hadopi peut mais peut ne pas” – explication gravée dans les annales de l’autorité.

Hadopi en sursis

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L’Hadopi aurait donc décidé de “pouvoir”, en saisissant le Parquet. Une information qu’elle confirme, tout en se refusant à la commenter pour le moment. C’est désormais aux procureurs que reviennent la décision de donner une suite aux affaires, en déterminant si les internautes pris dans la machine Hadopi se sont rendus coupables d’un “manquement à l’obligation de surveillance de l’accès à Internet.” Pour rappel, ce n’est pas le téléchargement illégal d’œuvres qui est directement visé par la procédure, mais bien la “négligence caractérisée” constituée par le défaut de protection de l’accès à Internet, qui relève, rappelle l’autorité, “ d’une contravention de cinquième classe d’un montant maximum de 1.500 euros.” Peine qui peut se voir doublée d’une “suspension de l’accès internet pour une durée maximale d’un mois.

En octobre dernier, lors de la publication de son rapport d’activité, l’Hadopi lançait un “rendez-vous en juin 2012″ entendu à la cantonade. Manière subtile de s’inscrire dans la durée et de peser dans la balance présidentielle pour cette autorité qui disait aborder “son deuxième exercice avec sérénité, conviction et le souci d’enrichir continûment sa compétence”. Sérénité de façade pour une Hadopi dont le sort est plus qu’incertain : si Nicolas Sarkozy souhaite la renforcer, notamment pour lutter contre le streaming ou le direct download, sa suppression fait l’unanimité dans les autres partis. Y compris pour le favori des sondages François Hollande, pourtant enlisé dans la problématique de la protection des œuvres culturelles sur Internet.


Illustration par Geoffrey Dorne

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