OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 L’Espagne du #19J en affiches http://owni.fr/2011/06/20/lespagne-du-19j-en-affiches/ http://owni.fr/2011/06/20/lespagne-du-19j-en-affiches/#comments Mon, 20 Jun 2011 12:18:07 +0000 Ophelia Noor http://owni.fr/?p=70764 La marche du dimanche 19 juin [#19J] contre la crise a réuni plus de 200 000 personnes dans toute l’Espagne selon El Pais [es].  L’organisation n’a pas été laissée au hasard: le rendez-vous était donné dans six différents points de Madrid dès le matin, entre 9h00 et 10h00, pour converger vers la place Neptune à 14h00, au sud du parc Retiro, et à 200 mètres de l’Assemblée (El congreso).

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Des revendications inchangées

Les revendications restent les mêmes, sur la corruption politique, le changement de la loi électorale, la transparence bancaire, le système des hypothèques qui met à la rue des milliers de personnes et le chômage.Le rejet du pacte de l’Euro était cependant au coeur des revendications de cette journée de mobilisation. Ce dernier demande aux pays de la zone Euro de trouver un compromis et de faire des propositions sur différents points clefs: salaires et compétitivité, emploi, finances publiques et contrôle du déficit. Proposé par Bruxelles le 12 mars dernier, il sera soumis au vote le 27 juin prochain.

Carte réalisée par The Technoant (cliquer pour accéder au site)

Le 23 juillet, l’Espagne se donne rendez-vous à Madrid

Le mouvement du #15M prépare déjà la prochaine grande manifestation. Des marches de plusieurs centaines de kilomètres, venant des quatres coins du pays, se dirigent vers Madrid. L’acampada de Valence [es] tire la première, avec une marche de 500km sur 34 jours. C’est la route Est. La marche de Barcelone, [es] la route Nord-Est, partira le le 25 juin. Le rendez-vous est donné à Madrid le 23 juillet prochain.

Voici une deuxième sélection d’affiches issues du tumblr Voces Con Futura.

L'Espagne est arrivée à saturation. S'il vous plait, réessayez le 19 juin. Pour plus d'informations, lisez #spanishrevolution.Ils l'appellent "crise" mais c'est une escroquerie. Indignez-vous !

Faites nombre (ajoutez-vous au mouvement)

Politique, corruption et mensonges


C'est maintenant qu'il faut se lever et lutter ensemble contre la corruption

Si le système est totalement corrompu,l'autorité n'est rien d'autre qu'un pantin du système. Ne les laissez pas vous écraser.

Le pacte de l’Euro

Le 19 juin fais entendre ta voix. Dis non au pacte de l'Euro!

Le système ne veut pas de citoyens, il veut des esclaves. Non au pacte de l'Euro

Le 19 juin, descendons dans la rue

Expulsions et banques

Des familles expulsées. Votre violence. Notre indignation. 19juin

Hypothèque. Jusqu'à ce que la mort nous sépare.

Le rêve de la banque produit des monstres

Organisation de la mobilisation à Madrid

Marche des colonnes, le 19 juin (les 5points représentent les lieux de rendez-vous aux quatre coins de Madrid)

Marchons ensemble contre la crise et le pacte de l'Euro.

Le 19 juin : tous les quartiers au Congrès

Globalisation du mouvement

Je veux être islandais

Levez-vous maintenant !

Réveil de la conscience citoyenne

Le moment est venu de faire ton choix. Dimanche 19 juin sur toutes les places.

Agis ! Ne sois pas un légume !

La télévision : "Je mens" - Eteins la télé et descends dans la rue !

Tu naîtras, vivras et mourras libre. 15M. Créer c'est exister. Exister c'est créer.


Source des affiches : Voces con futura
Entretien avec Voces Con Futura in La voix graphique de l’Espagne

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Printemps arabes: six mois de lutte et d’espoir http://owni.fr/2011/06/16/printemps-arabes-six-mois-de-lutte-et-despoir/ http://owni.fr/2011/06/16/printemps-arabes-six-mois-de-lutte-et-despoir/#comments Thu, 16 Jun 2011 17:41:31 +0000 Admin http://owni.fr/?p=68302 Six mois. Cela fait six mois que Mohamed Bouazizi s’est immolé à Sidi Bouzid. Son acte désespéré a ouvert la voie à ce que certains ont appelé “le printemps arabe”. Toute la journée de demain, nous nous associons à France Culture pour une journée de débats, d’interviews, de reportages et d’analyses centrés autour de cette thématique:

De Tunis à Madrid: Démocratie, une nouvelle jeunesse?

D’ici là, retrouvez ici une sélection d’articles publiés sur OWNI ainsi qu’une timeline permettant de les situer dans la chronologie des évènements.

L’Europe entre crise économique et indignation

06 juin 2011: “Espagne Labs : inventer la démocratie du futur” (Espagne)

Des assemblées numériques reliées entre elles, un réseau social alternatif, des outils open source et des licences libres en support, le tout coordonné au niveau technique par des hackers. Les acampadas du 15M se préparent à la globalisation du mouvement.

04 juin 2011: “La voix graphique de l’Espagne” (Espagne)
Des voix qui s’élèvent en Espagne pour un changement de système et une démocratie plus juste, nous vous présentons aujourd’hui le versant graphique en 30 affiches.

02 juin 2011: Le peuple connecté se réveille en Grèce
Pression des institutions financières internationales et européennes. Répression du gouvernement. Mécontentement alimenté par l’utilisation des réseaux sociaux. La Grèce ne dort pas et pourrait bien se réveiller brutalement.

31 mai 2011: “Sol, ou quand l’impossible ne peut qu’advenir” (Espagne)
Les campements des villes espagnoles tiennent bon. Retour sur une semaine au cœur de la plaza del Sol au lendemain des élections municipales et régionales. Un récit de Marta Malo de Molina.

24 mai 2011: “Aux sources de la colère ibérique” (Espagne)
Dans la révolte espagnole actuelle, Internet n’a pas seulement joué un rôle de diffusion. La ley Sinde, version espagnole de la HADOPI, a été aussi été un détonateur du mouvement dans le décor économique sinistré.

22 mai 2011: “Sommes-nous prêts à la reconstruction du monde ?“(Europe)
S’appuyant sur l’exemple américain, caractérisé par des inégalités sociales profondes, Framablog envisage la chute du monde occidental, sur le modèle des révolutions arabes. Une utopie pas si irréalisable.

22 mai 2011: Manifeste ¡ Democracia real ya !” (Espagne)
Le mouvement ¡ Democracia Real Ya ! est à l’origine des premières manifestations du 15 mai contre la gestion de la crise économique. Voici leur manifeste, dont nous vous proposons la version française.

21 mai 2011: Comprendre la révolution espagnole
Alors que l’Espagne fait sa révolution sous nos yeux, Enrique Dans, professeur et blogueur reconnu, nous donne les clefs pour comprendre le soulèvement massif du peuple espagnol.

06 mai 2011: Madrid : Fonctionnement d’une assemblée de quartier
OWNI vous propose de plonger au cœur d’une assemblée de quartier et de comprendre son organisation et, au-delà, le processus de démocratie citoyenne, active et participative qui bourgeonne sur les places espagnoles.

05 mai 2011: “Un autre monde est certain” (Espagne)
José Luis Sampedro, écrivain et économiste espagnol de 94 ans, s’exprimait à la veille des manifestations du 15 mai sur les origines de la crise du système économique. Interview.

16 avril 2011: “Tout est prêt pour le changement” (Europe)
Peu d’entre nous arrivent à y mettre les mots, mais beaucoup le ressentent: le monde change. Les technologies sont là, les rapports de force évoluent… mais sommes nous prêts nous-mêmes à entrer dans une nouvelle ère?

Monde arabe

8 juin 2011: “Iranian stories, portail de témoignage” (Iran)
Iranian Stories est une plateforme trilingue de recueil de témoignages. Les témoins de la crise post-électorale de 2009 en Iran peuvent à raconter ce qu’ils ont vu, envoyer photos et vidéos, pour reconstituer un sombre pan de l’histoire iranienne.

07 juin 2011: “La Syrie coupée d’Internet (Syrie)
Vendredi, jour de manifestation de l’opposition, la Syrie n’était plus reliée à Internet. Les fournisseurs d’accès, proches ou aux mains du régime, semblent être derrière ce blackout de 24 heures.

31 mai 2011: “Interview de Slim404 (Tunisie)
Quelques jours après sa démission du gouvernement de transition tunisien, le blogueur Slim Amamou en explique les raisons. Dans un entretien accordé à OWNI, il pointe notamment du doigt l’appareil sécuritaire.

26 mai 2011: “L’exemple syrien désenchante Facebook” (Syrie)
En Syrie, la révolte gronde depuis février. La répression est féroce. Comme ailleurs dans la région, les activistes utilisent Facebook, qui montre ici ses limites. Analyse d’un chercheur du CNRS basé à Damas.

27 mars 2011: “Les accélérateurs du web arabe(monde arabe)
Pour le chercheur Yves Gonzalez-Quijano, les révolutions tunisienne ou égyptienne et leur dimension numérique mettent en lumière de nouvelles sphères publiques dans la jeunesse arabe.

10 mars 2011: “Pourquoi on ne peut pas prédire les révolutions par les données (monde arabe)
La séduisante idée de révolutions déclenchées par des conditions sociales bien définies ne tient pas la route. Prédire ces évènements est impossible, surtout quand les révoltes passées ne sont pas analysées sérieusement.

10 mars 2011: “Tunisie, Twitter, WikiLeaks et l’indécence(Tunisie)
Pour Bruno Walther, il faut raison garder : les événements en Tunisie, “c’est la révolte assez classique d’un peuple contre son oppresseur”. Le poids de l’Internet dans le processus doit être très relativisé.

08 mars 2011: “Facebook et Twitter ne font pas les révolutions (monde arabe)
Les cyber-utopistes qui pensent que les révolutions arabes ont été menées grâce aux réseaux sociaux ignorent les mécanismes d’activisme réel qui les sous-tendent.

30 février 2011: “Internet : Instrument de la contre-révolution égyptienne (Égypte)
Le retour d’Internet en Egypte était attendu comme une libération. Selon des témoignages sur place, il marque surtout la reprise en main du régime.

11 février 2011: “Internet et l’Egypte : qui contrôle qui ? (Égypte)
En Égypte, Moubarak essaie de contrôler Internet utilisé par la contestation pour le déstabiliser. Sans “jovialisme”, ni pessimisme, Internet apparait comme un outil de la contestation que le pouvoir peine à museler.

30 janvier 2011: “Egypte le mode dégradé de la révolution(Égypte)
Internet coupé, c’est Al-Jazeera qui a permis de suivre au plus près le soulèvement égyptien. Au-delà de la couverture, c’est le produit de la somme des sociétés de l’information. Et le web revient par la petite porte…

A voir absolument: le printemps arabe vu et augmenté par Le Guardian.


Illustrations CC FlickR: Believekevin

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Espagne Labs: inventer la démocratie du futur http://owni.fr/2011/06/06/espagne-labs-inventer-la-democratie-du-futur/ http://owni.fr/2011/06/06/espagne-labs-inventer-la-democratie-du-futur/#comments Mon, 06 Jun 2011 07:14:06 +0000 Ophelia Noor http://owni.fr/?p=66317 Ne croyez pas que le mouvement espagnol s’étiole, bien au contraire ! Il entend passer à la vitesse supérieure, conscient de ses défauts et de ses qualités, et des décisions nécessaires à prendre pour avancer, sur le plan de l’organisation et de la logistique. La révolution, le changement, sont dans la rue et sur les places des quartiers. Mais c’est aussi sur les réseaux que se joue la partie la plus intéressante du mouvement, lancé par la manifestation du 15 mai dernier.

¡HackSol!

Dès la formation d’acampadasol et dans les jours qui suivent, les hackers de Madrid décident de prêter main forte au mouvement. Ils créent rapidement les outils de base qu’ils mettent à disposition de leurs compagnons comme les deux blogs Wordpress tomalaplaza et tomalosbarrios. Dans le bar du Patio de las Maravillas, rempli de lycéens bruyants, Dani raconte la naissance du collectif :

Le groupe Hacksol a surgi de lui-même de l’acampadasol. Nous nous sommes très vite rendus compte à l’ampleur du mouvement, qu’il y aurait une montagne de choses à gérer au niveau technologique.

Le patio est un centre social et culturel autogéré, dans le quartier de Malasaña, berceau de la movida espagnole. L’immeuble est désaffecté, tout en travaux inachevés. Certains étages sont vides, d’autres accueillent des services sociaux, des réunions de quartier ou d’association, des ateliers artistiques, des cours d’espagnol ou des projections de films. Hacksol réunit également des programmeurs, des graphistes et des étudiants dont une partie sont au chômage. Les hackers apportent au mouvement leur expertise technique, numérique, et gèrent les infrastructures web du mouvement, des serveurs aux listes de courrier.

Dani me présente à ses compañeros, Antonio et Charlie, hackers de leur état, dépassés par les évènements mais jamais à court d’idées et de ressources. Le nombre de participants sur le réseau monté par les hackers a quadruplé, les serveurs ont chauffé, et ils ont vite été débordés. L’extension du mouvement dans la rue en Espagne et à travers le monde, se reporte sur le web. La nécessité de transposer cette intelligence collective sur le réseau est devenue une priorité.

“Mettre l’intelligence collective sur le réseau”

Ils expliquent :

A partir de ces constatations, il a fallu repenser le réseau que nous avions construit dans l’urgence et créer de nouveaux outils.

Le blocage sur la levée du campement de l’assemblée de Sol les a également poussé à se poser la question de la prise de décision et du vote avec les commissions. La création d’une sous-commission de Hacksol, le groupe VOX, composé de programmeurs, de juristes spécialisés dans le droit sur Internet, de sociologues et de politologues ainsi que de toute personne souhaitant participer, sera chargée de penser et de développer les outils de la démocratie du futur et de changer et améliorer les processus de décision actuels. Pas simple mais passionnant, et entre les mains de tous les citoyens.

La particularité de notre génération de hackers à Madrid, est de s’être mêlés à la population depuis toujours. Nous ne sommes pas inaccessibles, au contraire ! Cela fait 15 ans que nous partageons nos connaissances avec les centres sociaux et associations culturelles de quartier, à travers le montage d’infrastructures web et d’ateliers de formation.

Antonio nous écoute parler en tapant sur son mini ordinateur couvert de stickers. Il dit qu’il croit au changement, mais pas à la révolution. “Les révolutions entraînent beaucoup de morts et aujourd’hui nous avons les outils pour agir pacifiquement et obtenir ces changements.” L’Espagne serait-elle le laboratoire numérique de la démocratie demain ? Dani embraye : “Nous nageons en pleine expérimentation, c’est la première fois que des millions de personnes dans un pays et dans le monde se réunissent autour d’une même cause, pour une démocratie réelle et participative, pour changer le système actuel.” Et Tonio d’ajouter, en souriant :

Hemos entrado en el Madrix

Adieu Facebook, Twitter et Google : hola les outils alternatifs

Antonio a beau avoir l’air nonchalant il ne cesse de s’activer sur son ordinateur. Dans les cartons, le développement d’outils web, sous licence libre et open source, bien sûr, pour relier toutes les assemblées entre elles, au niveau local et national, avec les plateformes comme tomalosbarrios, mais aussi au niveau mondial avec une plateforme dédiée, Take the Square. En cours de finalisation, un téléphone 100% voIP permettra de se connecter dans le monde entier, gratuitement et d’envoyer des sms en masse. Un Skype de la culture libre, dont la béta est déjà prête, et développé avec le logiciel Linux Asterisk qui permet d’installer des centrales téléphoniques. Des listes de discussion et des Pirate-pad pour remplacer respectivement les google ou yahoo groups/documents. Et surtout, un réseau social alternatif et citoyen qui permettra de passer au-dessus de Facebook et Twitter.

Les deux premiers seront utilisés pour la communication extérieure seulement, comme une vitrine. Mais le plus important, les discussions des assemblées, les prises de décisions, les groupes, les comptes rendus, passeront par un autre réseau social, non commercial, du nom de N-1 créé par et pour la communauté, par le réseau Lorea qu’OWNI avait rencontré au Hackerspace de Toulouse la semaine précédente. N-1 a été développé avec le moteur de réseaux sociaux Elgg avec dans l’idée d’avoir toujours ses propres plateformes et de contourner les réseaux sociaux commerciaux. Tout en continuant à les utiliser intelligemment… L’idée est bien de parvenir à une certaine autonomie technologique et que ces outils servent de base à d’autres assemblées dans le monde.

Madrid fourmille d’idées et l’Espagne de hackatons en série. Le premier commence cette semaine à Madrid avec des développeurs de Lorea venus prêter main forte à l’équipe madrilène. Un quatrième hacker, Luca, venu d’un hacklab italien et qui a passé quelque temps à Barcelone, compte s’installer à Madrid dès cet été, “au cœur de la révolution démocratique”.

Les hackers sortent de l’ombre

La nuit est tombée sur Madrid, le patio de las maravillas est rempli de monde. Il est temps de se diriger vers Sol, où les quatre hackers ont rendez-vous avec quatre personnes de l’acampadasol, de la commission communication, pour préparer la grande assemblée générale du lendemain soir. Une cinquantaine d’acampadas d’Espagne, et des acampadas internationales [#interacampadas]. Sur la place de la puerta del sol, toutes les tentes sont occupées et le petit groupe se repli sur une cafétéria à moitié vide, d’une rue adjacente. Les quatre filles et les quatre garçons discutent pendant plus de deux heures, et point par point, l’échange se fait entre les besoins concrets des assemblées de quartier et les propositions de Hacksol pour améliorer le système actuel. Pour la première fois demain, les hackers se présenteront officiellement à tout le monde et auront l’opportunité d’expliquer le fonctionnement et le but des outils mis en place sur Internet.

Le lendemain, après l’assemblée de quartier Los Austrias à la Latina, direction la Tabacalera, un autre centre culturel autogéré dans le quartier populaire de Lavapiès, au sud de la place Sol. Le bâtiment est imposant, la hauteur de mur sous plafond doit bien atteindre sept ou huit mètres, des bâches en plastique font office de rideau entre les différentes pièces. Ici une scène musicale, là un atelier de peintre, et dehors, des jongleurs, un potager, des installations d’artistes. Dans le hangar à côté, les acampadas sont en réunion depuis deux heures. 100 à 200 personnes se trouvent sur le site, donnant au lieu des airs de Demeure du Chaos.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

À la recherche de l’autonomie technologique, Hacksol entre en scène sur les coups de 19h00, dans la nave trapecio, un grand hangar qui sert de salle de réunion. Ils font œuvre de pédagogie, expliquent la nouvelle organisation et les buts recherchés : décentraliser le mouvement – Madrid ne sera plus le point de passage obligé – et se répartir la charge sur la gestion des infrastructures web.

Chaque ville devra se mettre en contact avec des programmateurs ou des hackers de confiance. La red tiene que ser libre, tiene que ser nuestra (le Net doit rester libre, il doit nous appartenir)

Sont également abordées les questions juridiques et financières. Qui va payer pour les serveurs ? Qui sera responsable de la base de données des utilisateurs du réseau N-1 auprès de la Commission gouvernementale de la protection de données ? Qui prendra la responsabilité juridique des contenus publiés sur le réseau ?

Vient le tour des questions, où chaque acampada de Séville, Malaga, Algeciras, Oviedo, Donosti – et d’autres villes encore – fait part de ses besoins, mentionne les outils qu’elles utilisent déjà et en propose d’autres. La question du design des sites par exemple, est abordée par plusieurs acampadas et très rapidement, la décision est prise de mettre en place une coordination nationale des graphistes et des webmasters, avec une liste de discussion sur le modèle de celle qui existe déjà pour les programmeurs. Le représentant d’Algeciras invite même Hacksol à faire des ateliers de formation au web sur la plage pendant que celui d’Asturie précise qu’ils ont développé une application de co-voiturage qui pourra être mise à disposition de tous. Un autre propose d’utiliser des plateformes de crowdsourcing pour financer les coûts technologiques. L’ambiance est à la fois studieuse et bon enfant. L’assemblée prendra fin sur les coups de 23h00.

Ils ont bien en tête que les infrastructures et outils qui sont développés maintenant doivent pouvoir servir à tous, en Espagne et dans le monde entier. Pour eux il est évident que le mouvement va s’étendre et que les places vont se coordonner entre elles. Et que le changement viendra.


Photos et vidéos, Ophelia Noor pour Owni /-)

Image de Une par Voces con Futura

Retrouvez notre dossier sur la démocratie réelle en Espagne.

Tout les articles concernant l’Espagne sur Owni /-)

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Madrid: fonctionnement d’une assemblée de quartier http://owni.fr/2011/06/05/madrid-fonctionnement-dune-assemblee-de-quartier/ http://owni.fr/2011/06/05/madrid-fonctionnement-dune-assemblee-de-quartier/#comments Sun, 05 Jun 2011 19:25:44 +0000 Ophelia Noor http://owni.fr/?p=66184

Sauf indication contraire, tous les liens sont en espagnol

Si le mouvement du 15M, mobilisé contre le système politique espagnol actuel, est toujours vivace à Madrid, entre les assemblées générales de la place Sol et les nouvelles assemblées dans les quartiers, il doit faire face à des questions de fonctionnement cruciales pour assurer son avenir. Depuis l’annonce des résultats des élections régionales et municipales le 22 mai, le mouvement cherche à se décentraliser de Sol et “défendre dans toutes ces assemblées un fonctionnement transparent, à l’horizontal, (…) dont l’objectif principal sera d’éviter que surgissent des chefs qui décident pour l’ensemble de la communauté sans la prendre en compte, comme le font les politiques”. Les premières assemblées s’étaient donc réunies sur les places des quartiers le samedi 28 mai pour la première fois.

Madrid. Samedi 4 juin, au cœur de la Latina, l’assemblé de quartier Los Austrias ouvre sa séance à 12 heures sur la place Carros. Un quartier bobo de la capitale où vivent beaucoup de gens du spectacle (scénaristes, comédiens, etc..). Entre 50 et 100 personnes sont réunies sur la petite place, tous âges confondus. La modératrice ouvre la séance avec une présentation de l’assemblée de quartier, de ses fonctions et de ses objectifs : prendre des décisions sur les propositions d’actions concrètes et pour chacune d’entre elles, arriver à un accord unanime [un consenso]. Des équipes d’environ dix personnes animent la séance et à chacune d’entre elle est attribué un poste avec une liste de tâches. Aucune personne ne peut garder ce poste de manière définitive et un système de rotation est mis en place avec tous les citoyens de la place qui sont donc appelés à participer.

Composition et organisation des assemblées populaires

L’assemblée du quartier Los Austrias, sous la chaleur de ce samedi midi, était composée de la manière suivante :

  • Une modératrice, qui anime le débat, est chargée du bon déroulement général de l’ordre du jour, et de la durée de la séance. Elle suit les réactions de l’assemblée grâce aux différents types de gestes mis en place. (cf plus bas)
  • Un facilitateur : attentif aux débats, en cas de blocage, il va ré-articuler tout ce qui s’est dit précédemment et faire une proposition de consensus qui sera ensuite soumise au vote.
  • Une secrétaire de séance, qui prend en note les décisions finales qui seront actées.

  • Deux personnes chargées de la gestion des tours de parole : munis d’un cahier et d’un stylo, ils listent les personnes qui souhaitent prendre la parole pendant la séance.
  • Plusieurs délégués de séance qui seront chargés de faire le lien avec les autres commissions et porter le message de son assemblée de quartier à l’assemblée générale.
  • Un ou une interprète de la langue des signes.
  • Plusieurs personnes de la commission Respect, chargée de contrôler les débordements lors des discussions, comme les insultes par exemple.

Des gestes pour communiquer

Un système de gestes a été mis en place pour montrer visuellement son accord ou son désaccord ou le fait de vouloir nuancer une proposition. Un système qui permet de ne pas interrompre la personne qui termine son exposé, au modérateur de gérer le débat et en attendant que votre nom soit noté pour prendre votre tour de parole. Avant d’aborder les points clefs de l’ordre du jour, la modératrice ré-explique aux participants quels sont les différents gestes et leur signification.

#1- L’approbation

J’approuve.
Je suis en faveur de cette proposition.
Action : lever les bras et agiter les mains en tournant rapidement les poignets.

#2- Le doute ou la nuance

Je souhaite apporter une nuance à cette proposition.
Action : je lève un bras.
Les personnes sont ensuite invitées  à faire signe aux personnes chargées des tours de parole afin qu’ils les inscrivent sur la liste. Ils exprimeront ensuite leur point de vue à l’assemblée.

#3- Le désaccord avec blocage

Je suis totalement contre cette proposition.

Action : lever les mains et les croiser au niveau des poignets en fermant les poings.
..

Que se passe-t-il à ce moment là ?

Si une ou plusieurs personnes sont en désaccord radicale avec la proposition, des tours de paroles sont institués comme suit :

  • Trois personnes qui se prononcent contre.
  • Trois personnes qui sont pour.
  • Ces six personnes viennent tour à tour prendre le micro, et exposent leur opinion à l’assemblée.
  • La proposition est à nouveau soumise au vote.
  • Mais il subsiste encore des personnes contre la proposition.
  • On demande à l’assemblée si elle souhaite enclencher un autre tour de parole.
  • Si oui s’ouvre alors une autre série de tours de parole, toujours avec : 3 contre et 3 pour
  • L’assemblée vote à nouveau, pour la troisième fois.
  • S’il subsiste encore des personnes contre la proposition, elle sera soumise à nouveau à la prochaine réunion en prenant en compte les opinions exprimés

.#4- Hors-sujet ou répétition

La personne qui a pris la parole s’égare du sujet principal ou répète des choses qui ont déjà été dites.

Action : lever les bras et les mouliner.

#5- Ecourter la prise de parole

La personne qui a pris la parole s’éternise et doit en venir au fait.

Action : joindre les deux mains à plat en les levant vers le ciel.
.

#6-Le désaccord sans blocage

Je ne suis pas d’accord avec ce qui est en train de se dire, et je vous le montre par ce geste, mais je ne veux pas interrompre l’assemblée.

Action : passer plusieurs fois sa main, à plat et devant son visage, du haut vers le bas.

Blocages sur la prise de décisions

L’assemblée continue avec la lecture d’un résumé des propositions adoptées pendant l’assemblée générale de Sol [acampadasol] réunie la veille, vendredi 3 juin sur la place Sol à Madrid. Une assemblée générale de grande ampleur où étaient convoqués pour la première fois tous les représentants des 54 #acampadas d’Espagne et des internationaux #interacampadas. Est notamment évoquée l’épineuse question du campement sur la place : une minorité de personnes souhaitent maintenir en place les infrastructures actuelles. Une majorité souhaite décentraliser le mouvement de la place Sol et diriger toutes les énergies vers les assemblées de quartier, tout en conservant un point d’information.

Actuellement, le processus de prise de décisions mis en place joue contre l’assemblée générale à Sol [#acampadasol]. Il est extrêmement lent car il permet à tout un chacun de prendre la parole pour donner son opinion. Les propositions étant validées par un consensus unanime, une seule personne contre suffit à bloquer l’avancée du mouvement. Pour cette raison, l’acampadasol est bloquée sur cette question du campement depuis une semaine : “c’est le même groupe qui bloque toutes les décisions de l’assemblée “, me racontent les personnes de la commission communication, chargées des questions relatives à Internet. J’ai pu assister à leur réunion de coordination vendredi soir et tous sont conscients que ce type de blocage pourrait aussi intervenir au niveau des assemblées de quartier et affaiblir le mouvement.

Nous avons été infiltrés par des représentants de partis politiques, de syndicats, nous avons même eu affaire à une personne qui a parlé en notre nom aux médias. À Sol c’est le même groupe qui bloque les décisions et nous empêche d’avancer.

Pour cette raison, une nouvelle proposition vient compléter le processus de prise de décisions #3 “Désaccord avec blocage” et sera soumise pour ratification aux assemblée de quartier. La validation d’une proposition fonctionne dans cet ordre :
Assemblée de quartier ou de municipalité : propositions
Assemblée générale de Madrid : décisions en commun
Assemblée de quartier ou de municipalité : ratification
Assemblée générale de Madrid : décision définitive

À cela s’ajoute la création d’un groupe de travail, VOX, chargé de penser à des nouveaux processus de décision plus dynamiques à mettre en place dans cette nouvelle démocratie réelle qui prend corps chaque jour sur les places espagnoles.

Vers un consensus non unanime ?

Les citoyens qui ont pris en charge la séance font preuve d’humour et de patience, comme les participants de l’assemblée. Le système des signes est plutôt bien respecté, certains sont intimidés lorsqu’ils se retrouvent debout devant tout le monde avec le micro en main, pour exposer leurs point de vue.

La première proposition à l’ordre du jour est donc de permettre aux assemblées d’adopter des propositions sans consensus général. Il sera spécifié dans les actes, que la décision a été prise sans accord unanime. Au processus #3 décrit plus haut, s’ajoute donc la possibilité à la fin des trois tours de vote, d’adopter la proposition même s’il subsiste des personnes en désaccord, dans une proportion de 1 pour 100.

La proposition ne fait pas l’unanimité : une personne se prononce contre, comme le montre cette vidéo sous-titrée en français :

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Que va-t-il se passer ensuite ? Après plusieurs tours de paroles et plusieurs votes, le facilitateur fera un résumé de ce qui a été dit et formule une nouvelle proposition : “Nous nous rendons tous compte que nous sommes en phase de rodage et nous allons garder, pour le moment, le fonctionnement actuel, c’est-à-dire avec une prise de décision validée par un consensus général. Cependant, nous allons ajouter dans notre liste de tâche cette proposition sur le consensus non unanime et y travailler. Cette décision pourra bien sûr être révoquée lors d’une prochaine assemblée.” Après un tour de vote, la proposition du facilitateur est unanimement adoptée, des applaudissement retentissent, la médiatrice remercie l’assemblée et passe au second point de l’ordre du jour.

L’assemblée aura duré en tout presque trois heures.


Photos Ophelia Noor pour Owni /-)
Image de Une par Voces con Futura
Retrouver notre dossier sur la démocratie réelle en Espagne :

Espagne Labs: inventer la démocratie du futur

La voix graphique de l’Espagne

Comprendre la révolution espagnole

Notre précédent dossier, du 21 mai 2011, sur la naissance du mouvement.

Tout les articles concernant l’Espagne sur Owni /-)

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La voix graphique de l’Espagne http://owni.fr/2011/06/04/la-voix-graphique-de-lespagne/ http://owni.fr/2011/06/04/la-voix-graphique-de-lespagne/#comments Sat, 04 Jun 2011 08:31:14 +0000 Ophelia Noor http://owni.fr/?p=65543 La #spanishrevolution, qui se décline en campements et assemblées populaires à travers le pays, sur le web et les places des quartiers, est également visible graphiquement. C’est la voix créative de l’Espagne dont nous avons tous eu un aperçu à travers des photos diffusées sur le réseau, faite de slogans et de visuels souvent audacieux et inventifs.

Cette effervescence graphique sans précédent se retrouve surtout sur le web. Hormis les visuels officiels des collectifs les plus connus, comme Nolesvotes, Juventudsinfuturo, ¡Democraciarealya!, Toma la plaza !,  qui sont téléchargés et imprimés pour les manifestations, d’autres initiatives existent sur la toile. Deux projets notamment se distinguent dans la construction d’une mémoire visuelle collective de ce mouvement populaire :

L’un, Voces con Futura propose une sélection d’affiches très graphiques. Le projet est porté par une graphiste directrice artistique vivant à l’étranger et préférant garder l’anonymat “afin que l’attention soit dirigée vers les affiches et non les personnes”. Une idée que l’on retrouve dans les spécifications du projet, où il est précisé que les oeuvres seront publiées anonymement afin de ne pas faire de l’ombre à l’initiative. Contactée par email, elle nous raconte quelles étaient ses motivations :

En tant que graphiste espagnole expatriée je voulais me rendre utile au mouvement. Il me paraissait important de faire un travail de curation, et de communiquer, sur cette effervescence graphique. Tumblr est l’outil idéal pour sa diffusion.

La prochaine étape est l’extension du projet au niveau international, les consignes viennent tout juste d’être traduites, et un appel à participation vient d’être lancé sur la page d’accueil, tant aux graphistes qu’aux traducteurs.

L’ autre initiative s’appelle Spanish Revolution. Elle est portés par deux jeunes graphistes, Adrian Velez et Jorfe, récemment diplômés. Ils sont convaincus que “le monde a besoin de changer rapidement.” Et d’ajouter : 

Notre but était de créer un lieu d’expression pour tous ceux qui ont des choses à dire sous une forme artistique, un lieu pour laisser libre cours à nos inquiétudes, nos envies de hurler aux quatre vents que nous sommes fatigués du système.

Ce projet réunit des visuels beaucoup plus variés. On trouvera aussi bien des vignettes de BD que des dessins satiriques, des photos ou des affiches très graphiques comme celles de Voces con Futura.

Des dessinateurs connus et notamment de l’hebdomadaire satirique El Jueves ont participé à l’aventure ainsi que des photographes, des écrivains, et beaucoup de graphistes. Les deux compères ne s’attendaient pas à un tel succès, ni d’avoir le soutien d’Alex de la Iglesia, réalisateur et président démissionaire de l’Académie du Cinéma espagnole. Ils passent une bonne partie de leur temps libre a trier, éditer et sélectionner les affiches qui leurs arrivent chaque jour.

Nous vous proposons donc une sélection de 30 affiches des deux sites dont les références graphiques vont du cinéma aux jeux vidéos, en passant par les classiques détournements de logos ou d’affiches des révolutions passées. Les thèmes abordés reflètent autant les revendications politiques, économiques et sociales que la nature du mouvement en lui-même. Un mouvement dont les deux faces, dans la rue et sur Internet, sont indissociables et complémentaires.

La révolution espagnole ne sera pas télévisée.

(vocesconfutura)

Référence à Gil Scott Heron et à l’article tant commenté sur le web de Malcom Gladwell, ‘Why the revolution will not be tweeted” et publié dans le New Yorker.

(vocesconfutura)

Les politiciens nous pissent dessus, les médias disent qu’il pleut.

(blog spanishrevolution)

Ceux qui résistent réalisent leurs rêves.

(vocesconfutura)

Dessin représentant l’assemblée populaire de Sol à Madrid #acampadasol

(blog spanishrevolution)

Zapatero cherche à sortir de la crise : “Froid ! Froid !”

(blog spanishrevolution)

Désolés pour le dérangement, nous sommes en train de changer le monde.

(vocesconfutura)


“Si vous ne savez pas écouter le peuple, allez donc gouverner le Mordor.

“Eh! eh! What the fuck ! Ne nous envoyez pas vos racailles, nous en avons eu assez avec 30 ans de dictature”

(blog spanishrev)


Indignés !

(vocesconfutura)

“Loi d’Hondt : si c’est une démocratie, laissez-moi participer”.

(vocesconfutura)

Remise en cause du système de comptage des voix en vigueur en Espagne. La méthode d’Hondt [fr] [en] fait une première répartition des sièges en calculant le rapport en le nombre de voix obtenues et le nombre de sièges à remplir dans une assemblée. Mais une seconde répartition permet d’obtenir des sièges supplémentaires aux partis qui ont obtenu une forte moyenne. Ce système favorise donc nettement les grands partis.

“Démocratie interrompue. Fermé : je reviens dans 4 ans.”

(vocesconfutura)

“La violence, c’est de payer les gens 600 euros.”

(vocesconfutura)

En Espagne le salaire minimum tourne autour de 650 euros.

“Je suis là pour que tu fasses un choix…”

“Choisir quoi ?”

“…entre deux pastilles. Une rouge et une bleue”

“Non !”

(blog spanishrevolution)

Référence au film Matrix. Ici les pastilles représentent le PP, parti de droite, et le PSOE, parti de gauche.

“Les mains en l’air, ceci est un contrat ! Un travail digne pour tous.”

(vocesconfutura)

Votez Espoir !

(vocesconfutura)

#15M : “

“Vous vous rendez compte que nous pouvons nous organiser sans eux ?”

“Vous vous rendez compte qu’ils peuvent s’organiser sans nous ?”

(blog spanishrevolution)


Nous sommes plus nombreux.

(vocesconfutura)


“La même merde, une odeur différente.”
Zapatero : “Je ne comprends pas, pourquoi n’applaudissent-ils plus ?”
Rajoy : “Je ché pas Joché Louish. Au mieush, on leur donne des bonbons et ils vont che calmesh”
Zapatero : “Je commence à avoir peur, prends moi dans tes bras Mariano”
Rajoy : Tu chais ? Ch’avais chamais remarqué que ta peau était si doush
Zapatero : Tout n’est-il pas plus intense quand on sent que la fin de carrière est proche ? Oh embrasse moi Mariano !

(blog spanishrevolution)

Représentation du premier ministre socialiste José Luis Zapatero (à gauche) et de Mariano Rajoy, le président du Partido Popular, de droite.

Le dessin se moque particulièrement de Mariano Rajoy – qui a réellement un cheveu sur la langue – et fait référence à une remarque de ce dernier, lors d’un meeting politique, sur l’augmentation de la TVA : “La TVA va augmenter sur les bonbons (los chuches) qu’achètent les enfants ! La TVA va augmenter pour tous les espagnols !” Son erreur grammaticale – il dira, los chuches au lieu de las chuches -  va tourner sur le web espagnol.

Comme BHL collectionne les tartes à la crème, Rajoy les mèmes sur le web.


Erreur du système (vocesconfutura)

#15M : Logement, retraite, chômage, minimum vital, hypothèques, corruption, banquiers.

(blog spanishrevolution)


La révolution s’écrit avec un #hashtag.

(vocesconfutura)


Nouvelle dosette pratique, efficacité maximum en politique. La force de nettoyage vient à bout de toutes les saletés.

(blog spanishrevolution)


1er dessin : “Nouvelle révolution, nouvelles armes”

2ème dessin : “Génération Ni-ni : ni travail, ni logement, ni retraite, ni futur”

“Non ! Sérieusement ? Et maintenant, où vais je trouver la place de ranger tous ces diplômes ?”

(blog spanishrevolution)

Peu de pain, beaucoup trop de chorizo.
Il s’agit ici du détournement du logo de la banque Santander, dont le dirigeant Emilio Botin est particulièrement visé par les manifestants, comme un des premiers responsable de la crise économique que subit le pays.

(voces con futura)

Expulsion pacifique : les ordres sont clairs , donnez leur du café avec des coups de massue

(blog spanishrevolution)

Un nouvel espoir contre la corruption politique (Détournement de Star Wars)

(blog spanishrevolution)


(blog spanishrevolution)

“Désolé Mario, mais ta démocratie est dans un autre château.”

(blog spanishrevolution)

Référence au jeu vidéo de Nintendo Marioland.

#democraciarealya (une démocratie réelle maintenant)

#acampadasevilla (campement de la ville de Séville)

#setasrevueltas (champignon retournés)


Système SOLaire

(voceconfutura)


Les affiches sont disponibles au téléchargement sur les sites de Spanish Revolution et Voces Con Futura.

Retrouver notre dossier sur la démocratie réelle en Espagne :

La voix graphique de l’Espagne
Comprendre la révolution espagnole

Notre précédent dossier, du 21 mai 2011, sur la naissance du mouvement.

Tout les articles concernant l’Espagne sur Owni /-)

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http://owni.fr/2011/06/04/la-voix-graphique-de-lespagne/feed/ 17
#g(r)eekrevolution http://owni.fr/2011/06/02/greekrevolution-grece-fmi-ue-spanishrevolution/ http://owni.fr/2011/06/02/greekrevolution-grece-fmi-ue-spanishrevolution/#comments Thu, 02 Jun 2011 12:17:14 +0000 Nikos Smyrnaios http://owni.fr/?p=65776 Le dimanche 29 mai 2011 la place Syntagma d’Athènes a connu l’une des plus grandes manifestations de son histoire. Cent mille Indigné(e)s ont occupé la place pacifiquement et beaucoup d’entre eux y sont toujours. Dans le sillage du Printemps arabe et de la Democracia Real espagnole, un nouvel acteur politique est en train d’émerger dans le pays : le peuple connecté.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Le 29 mai, la place de Syntagma, où en 1843 la foule avait réclamé une Constitution, était noire de monde. Elle n’a pas désempli depuis. Comme en Tunisie, en Égypte et en Espagne – toutes proportions gardées – le mouvement agrège des groupes sociaux divers. Il y a les fonctionnaires décriés et dévalorisés, les petits entrepreneurs familiaux subissant la récession, les retraités paupérisés, les cadres du privé dépités par la corruption.

Le mouvement des Indignés grecs se présente comme « apolitique », ressemblant un large éventail d’opinions allant de l’extrême gauche aux patriotes de droite, et des étatistes aux libéraux. Mais ce sont surtout les jeunes – étudiants chômeurs et salariés – qui constituent le cœur du mouvement. Polyglottes, sur-qualifiés et frustrés de leur sort, ils sont aussi les plus déterminés.

Infrastructure informationnelle

L’emprise des jeunes a introduit l’internet et les médias sociaux dans la partie. Ils constituent l’infrastructure informationnelle du mouvement. Les blogs, les réseaux sociaux et les plateformes d’hébergement de contenu permettent de se coordonner, mais également de proposer une information alternative en temps réel. Et ceci à une échelle internationale. Le contact avec les Espagnols par exemple est permanent. Les uns observent les autres par webcams et smartphones interposés. On s’inspire des innovations et des initiatives qui se créent aux quatre coins de l’Europe, on se chabre, on se motive…

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Le journalisme citoyen est au cœur du mouvement grec car il permet d’abord d’articuler une voix discordante face à l’uniformité des médias traditionnels. Ces derniers, aux mains d’une élite d’hommes d’affaires ayant largement profité des largesses de l’État, ne cessent de déformer la réalité sociopolitique du pays pour soutenir les mesures du gouvernement et de la Troïka. C’est la raison pour laquelle, en Grèce, les médias et les journalistes les plus en vue sont violemment rejetés par la population, au même titre que le système politique.

Le 29 mai, Mega Channel, la chaîne la plus regardée du pays, a subi ainsi sur Facebook un assaut par des anonymes qui voulaient protester contre la faible couverture du mouvement. Une vague des commentaires critiques voire insultants a obligé Facebook à  bloquer l’accès à la page officielle de la chaîne. Le lendemain de l’attaque, le journal télévisé de Mega a couvert la manifestation des Indignés avec plusieurs reportages et sur un ton très favorable.

Facebook a d’ailleurs été le facteur qui a permis au mouvement de se massifier étant donné son taux de pénétration de plus de 70% des internautes. Il a permis aux Indignés de toucher des populations non habituées aux manifestations. Des gens qui n’avaient jamais manifesté y ont été entraînés par des connaissances plus ou moins proches.

Système d’information alternatif

Au delà de son rôle dans la dénonciation et la mobilisation, l’internet grec a donné ces derniers temps naissance à un véritable système d’information alternatif, fondé sur le journalisme citoyen. Les composants de ce système préexistaient pour la plupart, mais le mouvement des Indignés les a structurés autour d’une cause commune. Ainsi, tous les soirs Radiobubble construit son journal radiophonique à partir des informations de terrain diffusées par ses auditeurs à travers Twitter. Implantée au centre d’Athènes, elle fédère un réseau des correspondants composé de journalistes professionnels et de simples citoyens.

Le portail ThePressProject quant à lui rediffuse tous les soirs en direct l’Assemblée générale tenue sur la place de Syntagma. Les créateurs du site ont également financé le documentaire Debtocracy, dénonçant les effets de la dette dite « odieuse », c’est à dire illégalement contractée. Ils ont utilisé la méthode de crowd-funding, faisant directement appel aux dons des internautes, pour permettre aux journalistes Katerina Kitidi et Aris Hatzistefanou de tourner un film. Celui-ci a dépassé depuis le demi million de visionnage sur les différents plateformes web et a été traduit en plusieurs langues. Les sites internet ad hoc, comme Real-democracy.gr ou M25gr, se sont joints aux centaines des blogs préexistants et aux groupes Facebook qui poussent comme des champignons.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

En dépit des techno-sceptiques comme Evgeny Morozov, l’exemple grec démontre encore une fois qu’internet constitue désormais la condition matérielle sine qua non de tout mouvement social de masse. Il ne s’agit pas d’un miracle technologique, mais d’une configuration historique unique alliant des mouvements sociaux et générationnels divers mais proches à des outils de communication inédits. C’est le mouvement des cognitaires, y compris en Grèce.

Le but des Indignés consiste désormais à occuper l’espace public. Des dizaines d’assemblées générales se tiennent tous les soirs à Athènes, Thessalonique ou Patras. Le mouvement se structure petit à petit. Il entre ainsi dans sa phase la plus difficile. Il s’agit d’accoucher d’une mutation sociale et politique profonde. Sa principale revendication est que le peuple ait son mot à dire sur la suite : un referendum sur l’acceptabilité, ou pas, des mesures d’austérité à l’image de l’Islande est désormais exigé.

Une tutelle de fait de la troïka : FMI, UE, BCE

Parmi tous les pays européens en crise, la Grèce est indiscutablement dans la pire situation. Depuis 2010, la Troïka composée de l’Union européen, de la Banque centrale européenne, et du Fond monétaire international exerce une tutelle de fait sur le pays, le gouvernement socialiste du Pasok assurant l’exécution des injonctions. Pour les salariés et les retraités, celles-ci prévoient diminutions de salaire, suppression des conventions collectives et hausses de la fiscalité indirecte, socialement injuste. L’objectif déclaré de cette politique, largement illusoire, est de permettre à la Grèce de rembourser les dettes faramineuses que les gouvernements successifs ont contractées depuis trente ans.

Les Grecs sont pris en tenaille entre la dégradation accélérée de leur niveau de vie, qui désormais touche toute la population, et les exigences pressantes de leurs créanciers. Ces exigences minent la croissance, laminent le pouvoir d’achat et augmentent les tensions sociales déjà exacerbées. C’est ainsi que fonctionne le cercle vicieux dont les conséquences s’étalent sur les écrans de télévision du monde entier, entre dégradations par les agences de notation et violents affrontements avec la police.

Cette mécanique n’a pu être enrayée jusque là. Les partis de gauche minés par leurs divisions et les centrales syndicales perçues comme archaïques et/ou complices de la situation peinent à mobiliser sur les mots d’ordres classiques de grève et de manifestation.

Les défilés syndicaux et militants se heurtent systématiquement à la répression policière. Lors du dernier défilé de ce genre le 11 mai dernier, un manifestant et blogueur, Yannis Kafkas, a été frappé violemment par les policiers anti-émeute. Il a finalement échappé à la mort après être resté plusieurs jours dans le coma. Un Français présent sur place et dont le tabassage a été filmé a même témoigné de la violence de cette répression. En Grèce, tout le monde se souvient aussi des trois employés de la banque Marfin brûlés vifs dans leur lieu de travail lors de la manifestation massive du 5 mai 2010.

Mais l’exemple espagnol et une rumeur infondée ont suffit à renverser la situation. Les jeunes d’abord, puis la masse des classes moyennes, largement fatalistes jusqu’à là, ont fait irruption sur la scène publique le mercredi 25 mai 2011. La rumeur, infondée mais reprise sur des blogs et jusqu’aux médias dominants, voulait que les Espagnols de la Puerta del Sol avaient inventé un nouveau mot d’ordre provocateur :

Silence, les Grecs dorment !


Article initialement publié sur Smyrnaios sous le titre : “#greekrevolution: en Grèce la révolte rime avec Indignation et Internet”
Crédits photo FlickR CC by-nc-nd Giotse

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Les propositions de ¡Democracia Real Ya! http://owni.fr/2011/06/01/les-propositions-de-%c2%a1democracia-real-ya/ http://owni.fr/2011/06/01/les-propositions-de-%c2%a1democracia-real-ya/#comments Wed, 01 Jun 2011 09:40:24 +0000 Admin http://owni.fr/?p=65414

Nous avions publié le manifeste du collectif  ¡Democracia real ya! la semaine précédente, voici les propositions, votées en assemblée le 19 mai sur la place Sol à Madrid.

Elles abordent sept points en détail : la classe politique, les banques, les services publics, la démocratie participative, les impôts, le chômage et le logement. Les demandes principales concernent le changement de la loi électorale, une loi de responsabilité politique qui oblige les élus à rendre des comptes, l’augmentation du salaire minimum, le maintien des services publics.

La prochaine étape pour le mouvement concerne l’occupation de la place Sol, la décision devrait être prise cette semaine. Pour le moment, la décision a été prise de restructurer le campement [es]. Ce matin, le ministre de l’intérieur Alfredo Perez Rubalcaba a averti les manifestants qu’ils ne pourraient pas rester plus longtemps sur la place” [es] en raison notamment de la perte de chiffre d’affaires des commerçants.

1. Suppression des privilèges de la classe politique

  • Contrôle stricte de l’absentéisme des élus à leurs différents postes. Sanctions spécifiques contre les abandons de postes.
  • Supression des avantages sur le paiement des impôts, les années de cotisation et le montant des retraites. Alignement du salaire des élus sur le salaire médian espagnol, en ajoutant les indemnités de déplacement qui sont nécessaires pour l’exercice de leurs fonctions.
  • Fin de l’immunité associée à la fonction d’élu. Les délits de corruptions seront imprescriptibles.
  • Publication obligatoire du patrimoine des élus.
  • Réduction des postes obtenus par nomination.

2. Lutte contre le chômage

  • Répartition du travail pour développer la réduction du temps de travail et un accord sur le travail jusqu’à élimination du chômage structurel, c’est à dire jusqu’à ce que le taux de chômage descende en dessous de 5%.
  • Retraite à 65 ans et aucune augmentation de l’âge de la retraite pour en finir avec le chômage des jeunes.
  • Bonus pour les entreprises qui comptent moins de 10% de contrats de travail temporaires
  • Sécurité de l’emploi : interdiction des licenciements collectifs dans les grandes entreprises qui font des bénéfices, et vérification de leurs comptes pour s’assurer que les travailleurs embauchés en CDD n’auraient pas pu l’être en CDI.
  • Rétablissement de l’allocation chômage de 426 € pour tous les chômeurs de longue durée.

3. Droit au logement

  • Expropriation par l’Etat des logements construits “en stock” et invendus pour les remettre sur le marché en tant que HLM.
  • Aide financière au logement pour les jeunes et toutes les personnes à revenus faibles.
  • Autoriser la donation de biens pour payer son logement et lever les hypothèques.

4. Services publics de qualité

  • Suppression des dépenses inutiles dans les administrations publiques et mise en place d’un système de contrôle indépendant des budgets et des dépenses.
  • Recrutement du personnel de santé pour en finir avec les listes d’attente.
  • Recrutement d’enseignants pour obtenir un nombre d’élèves par classe décent, et permettre le travail en petits groupes et les classes de soutien.
  • Réduction des frais de scolarité appliqué à tout l’enseignement universitaire, des troisièmes cycles aux 1ers cycles.
  • Financement public de la recherche afin de garantir son indépendance.
  • Des transports publics à un prix abordable pour tous, de qualité et respectueux de l’environnement : rétablissement des lignes de train classiques remplacées par l’AVE (ndlr : TGV espagnol), et de leur prix d’origine. Réduction du prix des tickets d’autobus. Restreindre la circulation automobile dans les centres urbains et construction de pistes cyclables .
  • Ressources sociales locales : mise en application de la loi sur la Dépendance, des réseaux municipaux de soins, des services locaux de médiation et de mise sous tutelle.

5. Contrôle des organismes bancaires

  • Interdiction de tout sauvetage ou injection de capital pour les organismes bancaires : les institutions en difficulté doivent faire faillite ou être nationalisées pour constituer une banque publique sous contrôle social.
  • Augmentation des impôts des banques proportionnellement aux dépenses sociales causées par la crise provoquée par leur mauvaise gestion.
  • Restitution au Trésor public de toutes les aides publiques reçues par les banques.
  • Interdiction pour les banques espagnoles d’investir dans les paradis fiscaux.
  • Régulation au moyen de sanctions des mauvaises pratiques bancaires et de la spéculation.

6. Fiscalité

  • Augmentation du taux d’imposition sur les grandes fortunes et les organismes bancaires.
  • Suppression des SICAV.
  • Rétablissement de l’impôt sur la fortune
  • Le contrôle réel et efficace de la fraude fiscale et la fuite des capitaux vers les paradis fiscaux.
  • Promouvoir au niveau international l’adoption d’une taxe sur les transactions financières internationales (taxe Tobin).

7. Libertés citoyennes et démocratie participative

  • Non au contrôle de l’Internet. Abolition de la Loi Sinde.
  • Protection de la liberté de l’information et du journalisme d’enquête.
  • Référendums obligatoires et contraignants  sur les questions de fond qui modifient les conditions de vie des citoyens.
  • Référendums obligatoires pour toutes les introductions de mesures dictées par l’Union européenne.
  • Amendement de la loi électorale afin de garantir un système réellement représentatif et proportionnel qui ne discrimine aucune force politique ou volonté sociale, et où les votes blancs et nuls seront également représentés au Parlement.
  • Indépendance du pouvoir judiciaire : réforme du Ministère public afin de garantir son indépendance, refus de la nomination par le pouvoir exécutif des membres de la Cour constitutionnelle et du Conseil général du pouvoir judiciaire.
  • Mise en place de mécanismes efficaces garantissant la démocratie interne au sein des partis politiques.

8. Réduction des dépenses militaires


L’affiche et le texte original en espagnol sont disponibles sur le site officiel de ¡Democracia Real Ya!
Traduction : Ophelia Noor /-)
Photos : Lucas Deve pour Owni /-)

Retrouvez tous les articles de notre précédente Une sur les mouvements sociaux espagnols et tous les articles sur l’Espagne.

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http://owni.fr/2011/06/01/les-propositions-de-%c2%a1democracia-real-ya/feed/ 22
Sol, ou quand l’impossible ne peut qu’advenir http://owni.fr/2011/05/31/sol-ou-quand-l%e2%80%99impossible-ne-peut-qu%e2%80%99advenir/ http://owni.fr/2011/05/31/sol-ou-quand-l%e2%80%99impossible-ne-peut-qu%e2%80%99advenir/#comments Tue, 31 May 2011 15:44:27 +0000 Marta Malo de Molina http://owni.fr/?p=65466

23/05 19H05 : Peu importe l'heure et l'affluence, le campement continue de grandir à chaque minute.

Ce texte de Marta Malo de Molina a été publié le 24 mai sur le site d’information Madrilonia.org. Il revient sur les évènements de Sol à Madrid au lendemain des élections municipales et régionales, remportées par le PP et marquées par un taux d’abstention record.

Depuis sa publication, l’assemblée de Sol [acampadasol] a décidé dimanche 29 mai dans la nuit, de prolonger la durée du campement jusqu’à la fin de cette semaine. Le mouvement ¡Democracia Real Ya! a pour sa part donné une conférence de presse lundi 30 mai [es] annonçant notamment un grand rassemblement international pour le 15 octobre 2011.

Owni se déplace à Madrid dans les jours qui viennent et vous rendra compte des suites du mouvement en direct de Sol et des assemblées de quartier.

Ecrire pour s’orienter, à la vitesse qu’impose le moment. Entre la poétique et la théorie, écrire pour apporter sa pierre à l’écriture collective du monde, pour contribuer, de l’intérieur, à la création de la place, pour prolonger cet événement qu’est Sol. Car oui, Sol a été un événement, l’un de ces surgissements inattendus qui redessinent la carte et ouvrent à nouveau l’horizon des possibles.

Le 15 mai, débordante de joie par le nombre des manifestants et la fraîcheur de l’atmosphère, une équipe de radio mobile interviewait quelques personnes : « Comment voyez-vous l’avenir ? » Beaucoup de réponses, en dépit de l’énergie ambiante, sont pessimistes : « sombre ». Lundi dernier [23 mai], quand la nouvelle du campement de Sol s’est répandue comme une traînée de poudre dans les réseaux sociaux, un participant d’une liste d’échanges de biens et services a écrit : « A quoi ça sert d’occuper la place, tant qu’il y en a qui continuent de faire leurs courses au Cortes Ingles à côté ? » Ca sert, car il ne s’agit pas de n’importe quelle occupation : le geste hardi de certains est devenu un signal pour beaucoup ; c’était « maintenant ou jamais », et la faim d’action a explosé, la faim de paroles.

23/05 04H25: "Cultive toi, toi aussi" peut-on lire sur le potager planté par les manifestants autour de la fontaine.

Graffiti : “l’impossible ne peut qu’advenir”


C’est la meilleure description de l’événement Sol. Partout la générosité, les sourires, des groupes d’amis qui décident « d’aller sur la place ensemble ». D’autres, l’instant d’avant étrangers,  sont devenus des compagnons à l’intérieur d’un mouvement, la place comme un aimant irrésistible… Un après-midi, le fils d’amis âgé d’un an et demi, s’est mis à crier « Sol ! Sol ! » ; nous nous étions éloignés et il réclamait ce Sol qui comptait tellement pour nous. Il y a dix jours personne n’aurait pu imaginer que Sol puisse représenter autre chose que le centre commercial et touristique d’une capitale européenne.

Sol, non comme lieu géographique mais comme événement inattendu, est venu ébranler deux des piliers de l’ordre des choses : d’un côté, il a brisé le consensus établi après la Transition, selon lequel l’actuel système de partis est le meilleur des systèmes de gouvernement et le remettre en question c’est ouvrir les vannes du chaos et de la dictature. Quand la journaliste Àngels Barceló [es] dit « nous ne devons pas céder à la tentation de mettre en cause l’actuel système démocratique », le mouvement insiste : « ce qu’ils appellent démocratie n’en n’est pas une». De l’autre, il rejette l’idée que la crise ne serait qu’un accident météorologique, et que la seule solution face à elle, serait de nous serrer la ceinture. Contre la gestion politique de la crise économique, Sol hurle « C’est du chantage, pas du sauvetage! » et désigne les responsables, politiciens au pouvoir et banquiers.

22/05 17H15: "Il ne nous représentent pas."

Ahuris, incapables de réaliser que « quelque chose est en train de bouger », acharnés à discréditer pour empêcher la contagion, les politiciens n’ont d’autre réponse  que le chantage des « alternatives » : « vous dites non, mais vous n’avez rien à proposer ». Ce qu’ils ignorent, c’est que, pour les générations sans avenir, l’incertitude face au lendemain est un vécu quotidien, et Sol nous permet, à tout le moins, de vivre collectivement cette incertitude. Il semblait évident que l’événement-Sol, et plus généralement le mouvement du 15 mai, ne pouvait qu’accentuer les tendances électorales ; et de fait la débâcle du Parti socialiste a été retentissante, y compris dans des villes, comme Madrid, déjà dirigées par le PP. Et maintenant ?

Les campements, celui de Sol et ceux des autres villes, continuent. Un ami dit : « Il ne s’agit plus d’aller dans la rue, il faut créer les places ». Sur la base de cette intuition, j’hasarderai l’hypothèse que la place ne se crée que si l’on insiste, si l’on approfondit les éléments qui l’ont rendue possible : en dénominateurs communs minimaux la critique du pouvoir politique, « Une vraie démocratie maintenant ! », et de sa gestion du pouvoir économique, « La crise doit être payée par ceux qui en sont responsables ! » ; la coopération du plus grand nombre comme force pratique qui rend la place réelle et tangible, qui rend le dénominateur commun minimal non seulement habitable mais délicieux, quelque chose qui vaut qu’on en fasse le pari. Contre l’auto-représentation des milliers de collectifs et de luttes qui existaient déjà, avec le risque de balkaniser les lieux, l’événement-Sol nous invite à chercher le  point de connexion, le lieu d’où contribuer à ce commun, en partant, bien sûr, de ce que nous sommes mais aussi de ce qui nous rassemble.

23/05 02H30: Lors de toutes les assemblées des traducteurs sourds-muets sont présents pour que tous puissent comprendre et participer.

“¡Pásalo!”

Et ce n’est pas tout. Le 15 mai a confirmé la force de cet acteur imprévisible que nous pouvons appeler « Faites passer ! » [¡pásalo!] . Le mouvement s’est auto-organisé avec cette exclamation simple et proliférante, dont la généalogie remonte aux mobilisations contre la guerre en Irak (en 2003), aux concentrations silencieuses du 13 mars 2004, pour exhorter le Parti populaire à dire la vérité sur les attentats de l’avant-veille à Madrid, ou encore la formation de V de vivienda en 2006.

Tout cela sans autre organisation que celle des réseaux d’amis et de coopération sociale, sans sigles ni programmes, avec des slogans simples et efficaces, en réaction contre un événement extérieur qui a fonctionné comme un rassembleur, un repère temporel, imposant l’urgence de sortir dans la rue (la guerre, les attentats du 11 mars, les élections…). Dès sa première apparition, beaucoup ont essayé de s’en emparer, faisant circuler des dates sur internet ; mais « Faites passer ! » [¡pásalo!] est un acteur méfiant, tout particulièrement des groupes organisés. Né de décennies de démobilisation politique, il insiste sur le pouvoir des « gens » des « personnes », du « peuple » ; il ne s’intéresse, en quelque sorte, qu’aux mobilisations peer-to-peer.

23/05 15H05: Au stand bibliothèque on trouve livres et journaux de tous bords. S'y cotoient "El Pais" et le très à droite "La Razon".

On a demandé à un garçon, arrivé de Bilbao à Sol après avoir suivi avec fascination ce qui s’y passait : « Et maintenant ? » Il a répondu :

Il ne faut pas avoir peur d’un épuisement du campement. Parfois les activistes, quand ils s’excitent sur quelque chose, s’y dévouent et l’étouffent, comme une mère hyper protectrice avec son enfant. Je ne suis pas un activiste, je vais m’en aller et retourner à ma vie, et quand quelque chose d’autre se passera je réapparaîtrai.

« Faites passer ! » [¡pásalo!] apparaît et disparaît. Comment contribuer sans étouffer. Comment habiter la (prévisible) diastole du mouvement sans angoisse. Comment apprendre à se rassembler en tant que partie prenante, certes infime, de l’acteur imprévisible. Ce sont toutes ces questions que Sol pose sur la table.

22/05 01H45 : Pelleteuse géante dans la nuit

Des amis argentins nous disent : « Tout ça est très intéressant, mais ce n’est pas l’Argentine en 2001. En 2001 ce sont ceux qui avaient été dépossédés par la crise qui ont pris la ville. Ici ce n’est pas le cas, on ne voit pas les signes de la crise ». Penser un mouvement en terme de « ce qui manque » n’a pas d’intérêt, ce qui importe c’est de penser à ce qu’apporte Sol à ceux qui ont été le plus touchés par la crise économique : ceux qui ont perdu leur maison, les chômeurs de longue durée, ceux qui sont en marge et ne peuvent plus participer à la consommation de biens de tous les jours, ceux qui, sans papiers, n’ont aucun espoir de régulariser leur situation parce qu’ils n’ont pas de contrat de travail, ou ceux qui ont des papiers mais qui les ont perdus parce qu’ils ne pouvaient pas cotiser suffisamment…

C’est ainsi que les zones sociales les plus concernées par « l’intervention sociale » sont les plus marquées par la désaffection politique… Ce sont les grandes inconnues de cette nouvelle ère inaugurée par les évènements de Sol. Comment tous ceux-là vont-ils s’(auto)-investir ? Le chemin sera long, mais le temps de la paralysie est derrière nous. Nous pouvons sourire.


Publié initialement sur Madrilonia.org
Photos de Lucas Deve pour Owni /-)
Traduction Isabelle St Saens Traduction additionnelle : Ophelia Noor



Marta Malo deMolina est une activiste espagnole. Elle participe à la revue internationale et transdisciplinaire Subjectivity et ces textes sont également disponibles sur le site de l’Université nomade de Madrid et l’institut européen pour des politiques culturelles progressistes.

Retrouvez tous les articles de notre précédente Une sur les mouvements sociaux espagnols et tous les articles sur l’Espagne.

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Aux sources de la colère ibérique http://owni.fr/2011/05/24/aux-sources-de-la-colere-iberique/ http://owni.fr/2011/05/24/aux-sources-de-la-colere-iberique/#comments Tue, 24 May 2011 13:16:12 +0000 Quentin Noirfalisse http://owni.fr/?p=64273 Sur fond de protestations populaires qui s’amplifient en Espagne, la gauche a lourdement perdu les élections municipales. Les sit-ins qui ont émaillé l’Espagne ces 7 derniers jours devraient se prolonger jusque dimanche prochain. Passée au crible, cette révolte ne nous apprend pas seulement qu’elle s’épanouit sur la toile en général et les réseaux sociaux en particulier, mais qu’Internet et les idées contraires que s’en font politiciens et citoyens aurait contribué, avec l’aide du marasme économique, à mettre le feu aux poudres.

Lundi 23 Mai, Puerta del Sol. 20:00h. À peine tapée, l’injonction galopait sur les réseaux sociaux. Elle s’adresse aux indignados, citoyens pacifiquement furibards d’une Espagne à genoux. Rendez-vous était pris pour gonfler davantage les protestations populaires sur la place du Sol, à Madrid, ce dimanche, alors que les décomptes des élections électorales et régionales commençaient. Depuis le 15 mai, les indignés ont investi les pavés ibères et les consciences désormais embarrassées de leurs représentants politiques. Ce dimanche-là, des manifestations s’emparèrent d’une cinquantaine de villes espagnoles. Des milliers de personnes s’agglutinèrent aux cortèges, dont la composition sociale bigarrée (employés, chômeurs, retraités, étudiants) scandait les trois mots du ras-le-bol : No les votes. Ne vote pas pour eux. Dans le viseur, les paquebots politiques à la dérive, socialistes du PSOE en tête, suivis de près par les conservateurs du Parti Populaire (PP) et la formation catalane de centre droit Convergence et Union (CiU).

Rapidement, les manifestations du dimanche 15, initiées par un appel de la plateforme ¡Democracia Real Ya! (Une vraie démocratie, maintenant !), engendrèrent d’autres activités de protestation. Depuis lundi, les tentes et les slogans champignonnent à Puerta del Sol. « Je ne suis pas antisystème, c’est le système qui est antimoi » ou « Vous sauvez les banques, vous volez les pauvres » traduisent une remise en cause globale d’une économie moribonde. Le taux de chômage dépasse les 20%, atteignant même 41% pour les moins de 25 ans. Ce deuxième chiffre est le même qu’en 2009, trahissant l’incapacité du gouvernement à offrir des solutions concrètes à la crise que traverse le pays.

Un diagnostic assassin

Un rapide coup d’œil au diagnostic économique effectué par l’OCDE sur le patient hispanique, frappé d’une crise immobilière aiguë, n’incite guère à l’optimisme : « l’économie sort lentement d’une profonde récession qui aura des conséquences durables », « détérioration prononcée des finances publiques », nécessité absolue « de réformer le marché du travail », etc. En dépit de la rigueur prônée par le docteur OCDE, le Laboratoire Européen d’Anticipation Politique estime dans son dernier bulletin, qu’en Espagne, comme au Portugal, en Grèce ou au Royaume-Uni, « la diminution de la couverture sociale et les mesures d’extrême-austérité mises en œuvre [...] font exploser le nombre de pauvres ».

Fait moins connu, le pays est également traversé par une corruption tenace. A tel point que le mouvement citoyen No Les Votes a développé un Corruptodrome, où s’esquisse impitoyablement une Espagne gangrénée par la spéculation urbanistique et les détournements de fonds. Plus encore que la politique du gouvernement Zapatero (premier responsable, dans les sondages, du mal-être hispanique), c’est un air du temps dominé par les magouilles tous partis confondus et les courbettes au sacrosaint univers de la finance qui étouffe les manifestants et justifie leur descente dans la rue. Pour la jeunesse espagnole, la génération la mieux formée de l’histoire du pays, l’horizon immédiat n’a rien d’autre à proposer que le trou noir de la débrouille.

L’Islande comme modèle

Caisses de résonance de ces inquiétudes, les premières manifestations du dimanche 15 mai n’ont guère intéressé les médias traditionnels. La police y a procédé à des arrestations qui ont encouragé des manifestants à créer un campement à la Puerta del Sol afin de réclamer la libération des détenus. Lundi 16, à l’aube, les campeurs-citoyens étaient dispersés par les forces de sécurité. Il n’en fallait pas plus pour que la colère gronde sur Facebook et Twitter et se prolonge avec insistance dans la rue. Rapidement, les calicots firent référence au précédent islandais, l’élevant même au rang de modèle.

En septembre 2008, Wikileaks publiait un rapport confidentiel sur la santé extrêmement vacillante de la Kaupthing, la principale banque du pays. Un mois plus tard, le pays chutait aux frontières du chaos économique. Hördur Torfason, un prolifique auteur-compositeur2, décida alors d’organiser, tous les samedis, guitare en bandoulière et micro en main, un rassemblement devant l’Althing, le parlement islandais. La mobilisation enfla au point de forcer la dissolution du parlement, l’organisation de nouvelles élections et agit comme le déclencheur d’une nouvelle attitude politique. Les banquiers qui avaient mené le pays dans les abysses statistiques allaient être poursuivis et la constitution rénovée. Cette semaine, Torfason, le héros malgré-lui de ce mouvement citoyen de fond, publiait une vidéo où il transmettait son expérience et ses encouragements aux manifestants espagnols.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Une loi comme détonateur

A Madrid, Barcelone et ailleurs, le passage d’un mécontentement stoïque et intériorisé à la rue tirerait son origine d’une décision politique sur l’Internet : la ley Sinde, version espagnole de la HADOPI française (comprenant également des accents de LOPPSI). Cette loi, introduite comme un amendement intégré dans une package législatif plus global, la « Ley de Economía Sostenible » (Loi pour une économie durable), définit un encadrement strict de l’Internet. Elle prévoit notamment de bloquer rapidement l’accès à des sites où l’on peut télécharger des contenus sous droits d’auteur. Pour Enrique Dans, professeur à l’IE Business School de Madrid et blogueur, l’origine des manifestations serait « le moment où les trois grands partis, PSOE, PP et CiU, ont formé un pacte pour faire passer la ley Sinde, en contradiction flagrante avec la volonté d’une grande majorité de citoyens, pour faire plaisir à un lobby. Attention, ceci n’est que le début, le détonateur : à l’heure actuelle cela n’a déjà plus d’intérêt ou de pertinence dans les manifestations. [...] De l’activisme contre la ley Sinde est né le mouvement #nolesvotes (ne votez pas pour eux)».

Dans rappelle toutefois que « les véritables raisons sont, et cela n’a échappé à personne, des sujets tels que la gestion de la crise économique, la corruption, le chômage [...] et surtout, la désaffection envers une classe politique identifiée comme l’un des problèmes majeurs de la citoyenneté dans les enquêtes du CIS (le Centre des études sociologiques) ». La liste d’une quarantaine de propositions concoctées par ¡Democracia Real Ya! contient, outre un contrôle accru de l’activité des politiques (et de leur absentéisme), un volet dédié aux libertés citoyennes et à la démocratie participative. Le premier point est clair : pas de contrôle de l’Internet et abolition de la ley Sinde.

De la Place Tahrir à la Puerta del Sol : un pas infranchissable

Rapidement, la tentation d’établir une comparaison avec les précédents tunisien et, surtout, égyptien s’est installée. Certains ingrédients semblent similaires. Utilisation des réseaux sociaux pour diffuser l’information et mobiliser les foules, avènement d’un visage symbolique (les pleurs télévisuels de Wael Ghonim, cyberdissident et ancien directeur marketing chez Google au Moyen Orient, d’un côté, la tirade téléphonique de Cristina, citoyenne de Burgos, qui s’insurgea contre des commentateurs moquant les manifestations, de l’autre), situations économiques pas jolie jolie et perspectives d’avenir étriquées.

Par rapport aux ponts jetés (notamment par certains manifestants) vers les révoltes égyptiennes, Jaime Pastore, professeur de sciences-politiques, distingue un « effet d’émulation ou de contagion » notamment grâce aux comparaisons faites « avec le symbolisme de la place Tahrir ». En insistant lourdement sur la différence de situation entre des Égyptiens cherchant à faire tomber une dictature et des Espagnols voulant contribuer à une nouvelle manière de faire de la politique, Pastore ajoute, dans une autre interview :

« Les révoltés dans le monde arabe sont confrontés à de vraies dictatures et ici, nous avons une démocratie de mauvaise qualité soumise à la dictature des marchés ».

Les contextes économiques sont également différents. L’Egypte faisait face à un manque criant de produits alimentaires de base et 40% de la population vit avec moins de 2 dollars par jour. L’Espagne, elle, est confrontée à un problème systémique que l’on retrouve dans d’autres pays occidentaux. A l’échelle européenne, elle est la manifestation la plus évidente et la plus marquée d’une croissance du chômage chez les jeunes, qui a bondi de près de 5% dans l’Union Européenne entre 2007 et 2009 selon l’Organisation mondiale du travail.

« Une dose d’urgence dans l’air »

La mobilisation espagnole sur, avec et en dehors d’Internet, a, selon Pastore, d’ores et déjà créé une « nouvelle subjectivité commune, plurielle et créative ». Son impact sur le long terme et, plus précisément, l’utilisation durable des réseaux sociaux, doit encore être démontré. En Egypte, l’enthousiasme autour de la « révolution Twitter-Facebook » a très vite été relativisé. Ainsi, le nombre d’utilisateurs de Twitter se définissant comme égyptiens au moment des manifestations se situait seulement, selon les données disponibles, aux alentours de 14000. Les réseaux sociaux s’étaient avérés être un moyen efficace de communication vers l’extérieur et vers les privilégiés dotés d’une connexion à l’intérieur, mais l’essor du mouvement relevait davantage d’une mixture dans laquelle le téléphone (arabe ou cellulaire), la capacité des masses populaires (déconnectées) à rejoindre les manifestations et le rôle d’une chaîne comme Al Jazeera se sont révélés déterminants.

Comme l’explique Anne Nelson, spécialiste des nouveaux médias, dans une tribune au Guardian, « les médias sociaux peuvent apporter une contribution impressionnante quand il y a une dose d’urgence dans l’air, qui se transforme rapidement en adrénaline. Sans cette charge, l’activisme en ligne peut s’évaporer rapidement. » Au vu du dynamisme virtuel et réel étalé par les manifestants espagnols, nul doute que le sentiment d’urgence a donné une impulsion décisive à leur action. Quant aux limites et opportunités des réseaux sociaux en situation de crise mais aussi en dehors, Geek Politics y reviendra en profondeur très bientôt.


Article initialement publié sur Geek Politics

Photos et Images FlickR CC : AttributionNoncommercialNo Derivative Works par cabreraluengo.comAttributionNoncommercialNo Derivative Works par SUXSIEQ, AttributionNoncommercialShare Alike par Toni Juliá

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Jose Luis Sampedro: “un autre monde est certain” http://owni.fr/2011/05/22/jose-luis-sampedro-la-vie-ne-s-arrete-pas-revolution-espagne/ http://owni.fr/2011/05/22/jose-luis-sampedro-la-vie-ne-s-arrete-pas-revolution-espagne/#comments Sun, 22 May 2011 17:56:33 +0000 Ophelia Noor http://owni.fr/?p=63927 Cliquer ici pour voir la vidéo.

Les sous-titres sont disponibles en cliquant sur “CC”, en anglais, et pour le français en version béta.

José Luis Sampedro, écrivain espagnol et économiste de 94 ans, a accordé un entretien à Movimiento Visual le 14 mai, la veille des manifestations organisées par le mouvement ¡Democracia Real Ya! et auxquelles il a apporté tout son soutien. La vidéo de dix minutes, alterne intelligemment les propos de Sampedro avec les paroles de gens de la rue qui lui font parfaitement écho, enregistrées le lendemain, pendant les manifestations du 15 mai.

Sampedro a connu la guerre d’Espagne, vécu sous le franquisme et enseigné l’économie pendant plusieurs années à l’université Complutense de Madrid et à l’étranger. Nommé à l’Académie royale espagnole en 1990, il connait le succès avec son roman Le sourire étrusque, chroniqué en 1994 dans Le Monde Diplomatique.

Avec une lucidité et une énergie incroyable, il expose les raisons qui ont mené les Espagnols à se révolter et descendre dans la rue, contre la classe politique actuelle et sa manière de gouverner, contre les mesures d’austérité économiques imposées pour “sortir de la crise”.

La crise des valeurs :

Notre culture occidentale vit une crise des valeurs brutale. Parce qu’elle a substitué les valeurs pour les intérêts économiques. Comme dirait Marx, ce qui prime c’est la marchandise. Ils le disent également dans le manifeste du mouvement ¡Democracia real ya!

L’humanisme :

Il existe d’autres formes de développement : développement de la personnalité, de son être intérieur. Être chaque fois meilleur, humain, plus positif, et non pas conditionné par la productivité.
Bien sûr qu’il existe des alternatives. Ne vous inquiétez pas, quand le système aura coulé, et il coule – ce que nous vivons actuellement est la barbarie que provoque son effondrement – autre chose viendra. La vie ne s’arrête jamais. Ou les banquiers pensent-ils qu’ils sont immortels ?

L’attitude à avoir est de prendre conscience de la réalité. Ne pas accepter, sans faire une auto-critique ou sans discussion intérieure avec soi même, tout ce qu’on nous dit.

Le paysage politique :

Les deux gouvernements possibles (PP ou PSOE) sont capitalistes (…). Les deux sont les esclaves des financiers. Et la preuve en est leur sortie de crise stupéfiante : ils gagnent à nouveau les salaires qu’ils veulent, ils vivent comme avant, se partagent l’argent comme ils veulent, font ce qu’ils veulent et pendant ce temps nous continuons à en payer les conséquences. Il me semble qu’il faut chercher un autre équilibre avec d’autres partis si c’est possible.

L’opinion publique :

Est ce que les gens sont fous ? Non, ils sont manipulés. L’opinion publique n’est pas l’opinion publique. Ce n’est pas le résultat de la pensées réflexive des gens. Ce qu’on appelle l’opinion publique est une opinion médiatique, créé par l’éducation et les médias. Les deux partagent les intérêts du pouvoir, parce que le pouvoir exerce un contrôle sur eux. Et c’est tout. En faisant de l’opinion publique l’opinion médiatique, vous tuez l’opinion des gens.

Les manifestations :

Bien sûr que s’il y a une manifestation et même si d’autres suivent et que les jeunes s’unissent, par dessus tout, parce que ce sont eux qui vont payer le prix fort, alors vous pourrez redresser les choses. Mais penser qu’une seule manifestation va changer les choses, c’est difficile. [...] Le système s’est dégradé. Il existe des alternatives. Et elles viendront quoiqu’il arrive. C’est certain. Dimanche 22 mai ? Je vais voter. Bien sûr que je vais voter.

“Un autre monde est possible”, et je dis, non, un autre monde n’est pas possible, il est certain ! Ce qui est sûr, c’est le changement. Jusqu’à quel point ? Cela dépendra de ce que nous ferons.


Retrouvez tous les articles de notre Une Espagne sur OWNI (illustration de Une CC Flickr Le Camaleon)
- Comprendre la révolution espagnole
- Manifeste ¡ Democracia real ya !

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